“Révoltés. La musique contestaire en 50 chansons”

“Révoltés. La musique contestaire en 50 chansons”

En ce moment, il y a deux revivals. Dans la musique et la mode, les années 80 sont à l’honneur et dans la vie des idées, c’est mai 68 qui occupe les esprits. Il faut dire que le contexte politique et économique qui est celui de la France en ce quarantième anniversaire des “événements” s’y prête. Comme les révolutions se font toujours en chanson, “Les Inrocks” en profitent pour mettre à l’honneur tous les artistes engagés. Qu’il s’agisse de rockeurs (ils sont fort nombreux, de Johnny Cash à Rage Against The Machine en passant par MC5 ou The Clash), de folk (les protest singers : Bob Dylan, Pete Seeger, Woody Guthrie, Buffy Sainte Marie) et même de jazz (John Coltrane, Nina Simone, Billie Holliday), tous y vont de leur couplet sur les problèmes du monde : racisme, abus de pouvoir, invidualisme forcené.

La soul est naturellement reprsentée (The Temptations, Sam Cooke, Martha & The Vandellas). On sait depuis le livre “”Sweet Soul Music” de Peter Guralnick (voir notre article) que cette musique est liée au mouvement des droits civiques aux USA (quand Curtis Mayfield, présent ici, chantait proclamait avec ironie sur la pochette d’un de ses albums “There’s no place like America Today”). Le sud géopolitique (Brésil, Jamaïque), qui a émergé ces trente dernières années sur la scène musicale notamment grâce à Bob Marley (absent mais première “rockstar” issue du Tiers Monde) est sous-représenté. La faute sans doute au fait que le magazine qui a chapeauté la compilation ait une culture “rock” qui fait que même si la world musique a sa place dans ses pages, il n’ose peut être pas assez céder plus de place à ses représentants quand il s’agit de vendre un triple disque.

Petit regret encore : si le hip hop est bien représenté (KRS One, NWA, Public Enemy, Grandmaster Flash, Beastie Boys, Ice Cube) le rap français n’est représenté que par NTM (“Qu’est-ce qu’on attend”, titre joussif autant que rageur). Dommage car La Caution et La Rumeur (ce dernier groupe est d’ailleurs enquiquiné par le ministère de l’Intérieur pour délit d’opinion) auraient eu leur place ici. Pour rester dans la rubrique “cocorico”, aux côtés de Noir Désir, Manu Chao et Cali (très convenus, surtout pour le dernier, ridicule dans son costume de penseur engagé), la seule découverte est Jean-Roger Causimon. Bian d’autres auraient mérité d’être là, à commencer par Béranger ou les Bérus. Bref une vraie compilation sur la musique contestataire chantée en français, qui pourrait remonter même dans l’entre-deux guerre, reste à produire.

****

“Révoltés. La musique contestaire en 50 chansons” (Les Inrockuptibles/Fnac)

première publication : vendredi 25 avril 2008

Jean-Marc Grosdemouge