Bugge Wesseltoft “Moving”

Bugge Wesseltoft “Moving”

La Norvège n’est pas que le pays de A-Ha : c’est aussi le nouveau refuge du cool. Bien avant l’apparition des Kings Of Convenience dont l’album “Quiet is the new loud”, paru chez Source début 2001 et qui sonnait comme un slogan (traduisez “la tendance est à la tranquilité”) a caressé nos oreilles ce printemps, elle avait déjà vu naître Bugge Wesseltoft.

Ce jeune pianiste dont le morceau “Existence”, issu de son premier album (“Sharing”), figurait sur la bande originale du film “Extension du domaine de la lutte” de Philippe Harel, est un enfant du jazz qui semble avoir découvert la house et la techno il y a peu, et qui s’en amuse follement…

Imaginez un mélange de Keith Jarrett et de trip hop, et vous aurez une idée de l’électro jazz de Bugge (prononcez “Beugui”). Ses concerts, auxquels il prend un réel plaisir (lors de son passage au Parc Floral de Vincennes en juin, il fut rappelé plusieurs fois par un public conquis) ressemblent à des sets tek-house. Sauf que Bugge n’est pas un bidouilleur de machines : c’est un vrai instrumentiste et il apporte à l’électronique ce qui lui manque parfois : une progression dans les morceaux.

La progression. C’est exactement ce qui manque à … par exemple : Saintt Germain. Ludovic Navarre a de bonnes idées. Bugge a de bonnes, de très bonnes idées, mais lui a compris qu’il faut construire les morceaux sur une progression : quelques notes de pianos, puis des rythmes breakbeat, puis des samples, puis une trompette en final. Chez St Germain, on sait que le morceau finira comme il a commencé.

Et puis St Germain ce n’est pas du jazz, puisque une amie à moi m’a avoué récemment détester le jazz alors qu’elle fut très prompte à encenser “Tourist” à sa sortie. Un album très surestimé pensent certains : l’avenir leur donnera-t-il raison ? Pas de quoi ne plus dormir la nuit : entre le musicien norvégien et le bidouilleur français, on n’est pas obligé de choisir !

Revenons à notre héros norvégien, et à sa passion pour le jazz. Au jazz, Bugge Wesseltoft emprunte la spontanéité, le goût pour le free. D’ailleurs jazzmen free et technoïdes n’ont-ils pas en commun le goût des expérimentations en tous genres ?

La “techno bop” du Norvégien surdoué est à savourer sur album, grâce à “Moving”, ou sur scène puisque Bugge, et son groupe (qui comprend notamment un DJ, qui sample des vinyls) se produit régulièrement dans des festivals de rock ou de jazz. L’occasion de faire se rencontrer les amateurs des deux genres…

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Bugge Wesseltoft “Moving”, 1 CD (EmArcy/Universal), 2001

lundi 31 décembre 2001

Change / Gare du Nord / Yellow is the colour / Lone / Moving / Heim

Jean-Marc Grosdemouge